La crise des missiles cubains ou le monde à l’orée de la 3e guerre mondiale

Le 1er janvier 1959, des insurgés conduits par Fidel castro et Che Guevara renversent le dictateur Cubain pro-américain Battista.

Les relations entre La Havane et Washington se détériorent rapidement après la réforme agraire de juin 1959, qui interdisait les propriétés de plus de 40,5 ha, après la nationalisation des raffineries de sucre (Août 1959) et la nationalisation des raffineries de pétrole (Octobre 1959).
A la fin de 1960, la valeur des biens des entreprises américaines confisqués par le nouveau régime cubain s’élevait à environ 1 milliard de dollars. Par mesure de rétorsion, les États-Unis rompirent les relations diplomatiques avec Cuba et donnèrent asile et assistance aux réfugiés cubains anticastristes (plus de 200000 dès 1961).

En octobre 1960, Washington impose à l’île un embargo commercial. Le 17 avril 1961, un commando d’exilés anticastristes soutenus et entraînés par les États-Unis débarque dans la baie des Cochons, au sud de l’île. L’échec de cette tentative d’invasion accélère l’orientation socialiste du régime, qui se rapproche de l’URSS, qui devint le principal acheteur de sucre cubain.

En 1960, le dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev promet la protection de l’Union soviétique au régime révolutionnaire de Fidel Castro, nouvellement installé à Cuba. Après un voyage à Moscou de Raul Castro, le frère du nouveau dirigeant cubain, en juillet 1962, l’URSS met rapidement en place à Cuba un plan de fourniture de missiles à portée moyenne et intermédiaire.

Cargo soviétique transportant des missiles a destination de Cuba

En mai 1962, Nikita Khrouchtchev déclenche l’opération Anadyr en envoyant 50 000 soldats, trente-six missiles nucléaires SS-4 et deux SS-5 ainsi que quatre sous-marins à Cuba pour empêcher les États-Unis d’envahir l’île. Mais,aussi et (je dirais même surtout ) pour donner une réplique au déploiement de missiles nucléaires américains en 1961 en Turquie. Ces missiles étaient pointés sur L’URSS.

Les missiles sont transportés dans le plus grand secret dans des navires russes acheminant du matériel agricole pour tromper la vigilance des américains.



Les services américains surveillent le trafic maritime russe en route vers Cuba, certains documents font état de mouvements de matières premières depuis l’Afrique et d’autres continents. Les tonnages reportés mois par mois montraient une augmentation croissante. L’analyse qui en est faite alors sous-tend l’anticipation des risques systémiques liés à la crise, notamment en préfigurant les conséquences d’un blocus.

Le 24 juillet 1962,un rapport d’écoute électronique fait état d’une présence anormale de quatre — peut être cinq — navires de transport de passagers russes en route vers Cuba (3 335 passagers à bord), avec une date estimée d’arrivée les 26, 28 juillet et 1er août (le Maria Oulianova, le Khabarovsk, le Mikhaïl Ouriskij, le Latviyia, l’Amiral Nakhimov).

A partir du 31 août 1962, une augmentation de l’activité des vols de MIGs cubains fut mise en évidence à partir de communications air-sol. Entre le 1er et le 4 septembre 1962, 76 indicatifs de pilotes furent reportés. Le 4 septembre, un total de 43 indicatifs pilotes furent notés actif entre 10 h 22 et 16 h 59 (5 h 22-11 h 59, heure locale).

MIGs-21 cubains en vol



Le 2 octobre 1962 débute l’opération Kama : quatre sous-marins d’attaque diesel-électrique de classe Foxtrot de la Marine soviétique appareillent de la péninsule de Kola, avec à leur bord des torpilles nucléaires T-5 (leur utilisation aurait pu déclencher une guerre nucléaire à l’initiative de l’URSS ; la nature nucléaire de ces torpilles ne fut révélée qu’en 2001). Les commandants du Choumkov, Ketov, Savisky et Doubivko avaient pour mission de rejoindre le convoi de cargos soviétiques qui faisait route vers Cuba, avec à leur bord les missiles nucléaires destinés à compléter le dispositif déjà en place sur l’île. Ils avaient pour mission de protéger le convoi, si besoin au prix du torpillage des navires qui tenteraient de s’interposer.


John McCone, directeur de la CIA, informa le Conseil de la sécurité nationale que les mauvaises conditions météo rendaient impossibles les prises de vues par les avions de reconnaissance U-2.

John McCone, directeur de la CIA durant la crise des missiles



Le 13 octobre, les sous-marins soviétiques franchirent la « barrière Açores – Terre-Neuve », après avoir essuyé, le 9 octobre, une tempête ayant causé des avaries à bord.

Mais le 14 octobre 1962, les deux superpuissances vont plonger dans l’une de leurs plus grandes confrontations de la guerre froide après que le pilote d’un avion espion américain U-2 effectuant un passage à haute altitude au-dessus de Cuba découvre les installations en cours d’assemblage sur l’ile (La photographie un missile balistique soviétique à moyenne portée SS-4 en cours d’assemblage plus précisément).
L’existence de ces missiles ne modifie pas de façon fondamentale l’équilibre militaire entre les deux grandes puissances, car le territoire américain est déjà vulnérable face aux missiles à longue portée installés en Union soviétique. Toutefois, la force du symbole (installer ce type d’armes à environ 150 km des côtes de Floride) constitue une provocation que les États-Unis ne peuvent laisser sans réponse sous peine de voir remise en cause la crédibilité de leur force de frappe.


Informé de la situation le 16 octobre,le Président américain John Fitzgerald Kennedy va immédiatement réunir un groupe de conseillers et de responsables 🇺🇸 .
A la suite de cette réunion d’urgence ,il sera décidé de placer un blocus naval autour de Cuba. Le but de ce blocus étant d’empêcher les Soviétiques d’apporter plus d’équipements militaires sur l’île .


Dans une intervention télévisée le 22 octobre 1962, le président J.F. Kennedy informe les Américains de la présence des missiles, de sa décision de décréter le blocus naval et d’exiger le retrait des missiles déjà présents et la démantèlement des sites.

Car le fait que les missiles cubains armés de tête nucléaires soient installés si près du continent américain, à seulement 90 miles au sud de la Floride constituaient une véritable menace directe pour le sol américain. À partir de leurs points de lancement,sur l’île castriste, ils étaient capables d’atteindre rapidement des cibles dans l’est des États-Unis.


Suite à cette déclaration publique, le monde entier attendaient nerveusement la réponse soviétique. Certains Américains, craignant que leur pays ne soit au bord de la guerre nucléaire, ont accumulé de la nourriture et du gaz.
le blocus aurait probablement déclenché une confrontation militaire qui aurait pu rapidement dégénérer en un échange nucléaire.

Surtout que le 24 octobre, à 10 h, le blocus était en place,alors que trente cargos soviétiques étaient déjà en route. Parmi eux, quatre avaient des missiles nucléaires dans leurs soutes. Deux de ceux-ci arrivèrent sur la ligne de blocus : le Khemov et le Gagarine.

Cargo soviétique survolé par des avions de surveillance maritime 🇺🇸


À 10 h 25, les cargos s’arrêtèrent, Khrouchtchev jugeant inutile de rompre le blocus puisque les missiles déjà en place à Cuba suffisaient.

Le 25 octobre, douze cargos rebroussèrent chemin, les autres poursuivant leur route. La Marine américaine manqua l’interception du Bucarest et renonça à le poursuivre puisqu’elle avait la certitude qu’il ne transportait pas de matériel militaire.


L’affrontement tendu entre les deux superpuissances se poursuivra tout au long de la semaine, et le 27 octobre, un avion de reconnaissance américain U-2 fut abattu au-dessus de Cuba,sans que le tir destructeur n’ait reçu l’aval de Khrouchtchev.

Avion espion 🇺🇸 U-2


Le 28 octobre au matin, Moscou laisse entendre qu’aucune négociation ne pourra se faire. Le même jour, la CIA annonce que 24 missiles soviétiques sont désormais opérationnels et pointés sur des points précis du sol américain.
Face a cette situation les américains répondent en des termes forts: « Si les Soviétiques ne démantelent pas leurs installations avant le 29 octobre, les États-Unis lanceraient une attaque aérienne sur les sites de missiles »


Dans la soirée, Robert Kennedy alla à l’ambassade de l’URSS à Washington pour une rencontre de la dernière chance avec le tout nouvel ambassadeur, Anatoli Dobrynine. Un compromis fut finalement trouvé.Nikita Khrouchtchev annonça sur Radio Moscou qu’il donnait l’ordre de démanteler les sites de missiles.

L’ambassadeur A. Dobrynine a la maison Blanche en compagnie du Président 🇺🇸 J.F Kennedy

Pendant ce temps, la chasse aux quatre sous-marins soviétiques battait son plein. Deux d’entre eux font surface, batteries à plat, pour les recharger. Ils firent comprendre aux navires américains de ne pas les provoquer. Le Doubivko, lors d’une manœuvre, se fait arracher son mat d’antenne par un de ses poursuivants. Il prit cette action comme une manœuvre délibérée.

Le Shoumkov était toujours en plongée. Trois grenades d’exercice furent lancées par son poursuivant pour lui intimer l’ordre de faire surface. Il choisit de plonger en lançant un leurre. Le bruit de ce dernier fut pris pour un lancement de torpille, et sa manœuvre d’évasion fut éventée. À bout de ses réserves d’oxygène, le Shoumkov fit surface au milieu de quatre contre-torpilleurs de l’US Navy. Rendant compte de la situation à Moscou, il reçut l’ordre de se tenir en mesure de réagir.

Le 29 octobre, l’URSS fit stopper ses navires restant en route vers Cuba et promit également d’enlever toutes ses installations militaires à Cuba. Le compromis nécessaire à la négociation fut un engagement des États-Unis à ne pas attaquer Cuba et à démonter dans 6 mois leurs 15 fusées PGM-19 Jupiter installées en Turquie, ainsi que d’autres en Italie, et donc pointées vers le bloc de l’Est (cette dernière partie de l’accord devait au départ rester secrète).


Finalement, la guerre avait fut évitée de peu. Cet accord fut notamment obtenu via l’ambassadeur Anatoli Dobrynine, qui demeurera en poste jusqu’en 1986.

Anatoli Dobrynine


Le 1er novembre, le dernier des quatre sous-marins soviétiques, le Ketov, était toujours introuvable. Les trois autres furent raccompagnés en haute mer.

Le 7 novembre, Khrouchtchev accepta que les cargos à destination de Cuba soient inspectés par l’US Navy.

On ne saura qu’en 2001 que les sous-marins soviétiques étaient armés de torpilles à tête nucléaire. Lors de sa confrontation avec les navires américains, le Shoumkov avait inséré une torpille nucléaire dans son tube lance-torpille numéro 1… Le capitaine voulait appuyer sur le bouton et tout faire exploser, mais un commandant en second Vasili Arkhipov l’a persuadé de ne pas le faire et a sauvé le monde de la guerre nucléaire.

L’année suivante, une liaison de communication directe « hot line » a été installée entre Washington et Moscou pour aider à désamorcer des situations similaires.

L’héritage de la crise était qu’elle a convaincu les Soviétiques d’augmenter leur investissement dans un arsenal d’ICBM capables d’atteindre les États-Unis depuis le territoire soviétique…..

ICBM 🇷🇺

Avec le temps, l’ascension de Cuba dans les relations internationales, en Afrique et surtout en Amérique centrale contrebalanceront la mise en échec infligée par Kennedy à Khrouchtchev et Castro, et amèneront certaines forces politiques américaines à envisager la mise en cause de l’accord de 1962 qui leur a fait « accepter l’inacceptable ». Ce fut un des thèmes de campagne en 1980 du candidat républicain Ronald Reagan. En octobre et novembre 1981, une nouvelle crise a failli éclater après l’annonce par la presse américaine de projets de bombardements aériens de Cuba causé par la volonté d’aller à la source des crises d’Amérique centrale (envoi supposé d’armes à la guérilla du Salvador). La Pravda du 9 novembre 1981 fait état « des conséquences extrêmement dangereuses pour la paix mondiale qu’auraient des mesures militaires contre l’île »

Près de 60 ans après la crise des missiles l’embargo des États-Unis contre Cuba (décrit à Cuba par le terme espagnol « el bloqueo » qui signifie « le blocus ») qui est un embargo économique, commercial et financier à l’égard de Cuba par les États-Unis mis en place le 7 février1962 à la suite de nationalisations expropriant des compagnies américaines est toujours en vigueur . Cet embargo commercial est le plus long de l’histoire moderne et contribue profondément a mettre l’île dans une situation de précarité permanente.

Publié par BaMinko

Fouineuse

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